Zoom sur … Hippolyte Tayo, Pasteur-hymnologue à L’EEC
- egliseevangeliquec44
- 14 août 2021
- 5 min de lecture
Dernière mise à jour : 19 août 2021
Le sourire de rigueur à l’instar de Celui qui est assis dans les Cieux

Certains portent la tenue de rigueur, d’autres le mépris comme une seconde nature. Quant au pasteur Tayo, en cette époque où la tenue n’est plus vraiment de rigueur, la toge sacerdotale est de mise lors de l’office ; mais ce dont il ne se sépare presque jamais, c’est son sourire. Il l’arbore à longueur de journée et d’occasion. Difficile de s’en dépatouiller ! « Sauf bien entendu quand il est face à une volonté manifeste de nuire le message du Seigneur », reconnaît-il, révélant ainsi, un pan d’une vie consacrée. Que dis-je ? Consacrée au Tout puissant.
Le Seigneur bénit ses serviteurs au-delà de leur quatrième génération. Le père Pierre Tayo, Pasteur bien connu des fidèles de l’EEC, a eu la Grâce d’être béni dès la première descendance. Car rien de mieux, en cette période de crise des vocations, de voir son fils embrasser le Seigneur en choisissant de devenir Pasteur.
A la différence d’Isaac, Hippolyte Tayo n’a pas été offert en sacrifice au Seigneur. Mais comme il fait toujours bien les choses, il s’est presque arrogé cet adepte de la musique du sourire, dont le tempo lui parvient certainement non tel un parfum de bonne odeur, mais comme une cadence bien rythmée.
Attiré à ces débuts par le savoir-faire de ce monde, il lui permet de découvrir et d’apprendre les subtilités du métier d'électrotechnique. Car après le BEPC, celui qui est devenu le premier Pasteur hymnologue du Cameroun, voulait s’initier à l’électricité. Mais très vite et très tôt, cet enfant de pasteur a vite été rattrapé par le métier de Papa. En second cycle, ignorant que Papa Tayo était pasteur, ses camarades l'affublent déjà du prénom de « Pasto ». Sans savoir qu’il s’agissait-là d’une réelle prémonition, il avançait sans coup férir dans la vie de tous les jours, électronicien dans le monde, pasto en embuscade.
Modifier le logiciel de notre vision du monde
Mais, patatras, un événement viendra changer sa vision du monde. Comme toujours, quand Dieu vous/nous appelle, il modifie le logiciel de votre façon de voir les choses. Demandez à Agathe Kuisssu de l’EEC de Champigny, elle vous en dira des tonnes là-dessus. Confronté à un professeur qui voulait qu’il le corrompt, il a compris, à cet instant, qu'il vivait dans un monde de de pourris. A la différence des jeunes actuels qui auraient cherché à arranger les choses, Hippolyte Tayo, prendra la poudre d’escampette. Et ses pieds à son cou. Direction Ndoungué.
Nous sommes en 1998. Quand il présente le concours pour être Pasteur. Quelle ne fut pas sa déception car arrivé major de cet examen, il ne sera pourtant pas pris. Ecarté par une injustice, celui qui est hymnologue aujourd’hui accuse le coup. Cinq ans plus tard, il retente sa chance et cette fois-ci, tous les voyants sont au vert. Il en profite pour faire cinq années de théologie à Ndoungué.
En 2001, il devient Evangéliste dans une annexe, à Mbouda (Bamboutos). L’occasion d’intégrer la chorale de la paroisse sous l'égide de l'UCJG (Union Chrétienne de Jeunes Gens). Ici il a découvert l’univers de la musique, et surtout son langage. Il apprend à composer des notes, ce qui lui permet de renforcer un pan de sa carrière consacré à la production musicale. « Car, cette technique (de note musicale) m’a permis de comprendre que je pouvais composer beaucoup de chansons.»
Sa discographie s’en est d’ailleurs subitement enrichie. En 1994, il sort un premier album : la Foi. S’en est suivi un album solo en 1999, une deuxième dix ans plus tard et un troisième en mars dernier.
Sorti de cet univers pédagogique, il devient Pasteur-Proposant à Messa-Mokolo où il est affecté. Il est consacré Pasteur en 2011. Mais la soif de toujours apprendre le pousse à solliciter une mise en disponibilité pour continuer ses études à l’école. Il intégrera l’Université Protestante d’Afrique Centrale (UPAC). Au terme de ce parcours, il obtient sa licence et son Master en théologie. Et est affecté à SOA.
La musique, un puissant vecteur de transformation sociale
Après une décennie de Pastorale, il ressent le besoin d’approfondir encore sa profession. C’est ainsi qu’il reprend ses études à Paris et à Strasbourg où il est reçu en étude doctorale. A cet instant, il entend s’enrichir sur le plan théologique. La musique étant considérée comme un puissant vecteur de transformation sociale, pourquoi ne pas capitaliser sur cette matière ? Surtout que selon la vox populi, chanter introduit la double spiritualité. Un constat qui lui sied très bien. Témoin, quand il s’inscrit en thèse, il opte pour le thème très recherché de l’hymnologie. En France, seules deux académies dont Strasbourg forment aux subtilités d’une telle science.
Hippolyte Tayo rejoint donc Champigny, puis Strasbourg, à la faveur de son inscription. Objectif : ajouter à la maîtrise de la parole qu’il a déjà, « celle des louanges, parent pauvre de l’Eglise camerounaise. Dans notre pays, nous consommons aisément des productions externes et du même coup, ne produisons pas grand-chose en local. Cela influence fortement notre culture qui tient moins compte des réalités locales », déplore Hippolyte Tayo. En descendant dans l’arène, il apportera certainement son écot à l’enrichissement de la louange nationale et contribuera non seulement à l’avancement du Royaume, tout en se positionnant, à son corps défendant, sur le terrain de la souveraineté, fut elle relative à des louanges.
Pour autant, on l’aura compris, grandir spirituellement passe aussi forcément par la louange. La production de cette musique, quelque nécessaire soit-elle, porte en elle, des risques à maîtriser. A la tête de ces aléas figure le vedettariat. Au lieu de porter attention au Christ, la tendance et l’erreur seraient de se mettre en scène, là où l' on oublie de se mettre au service de l’Eglise. Et de déplorer : combien de choristes ou d’instrumentistes se mettent en scène oubliant que la gloire revient avant tout à Jésus seul. »
Conscient de cette tentation et de la nécessité de la maîtriser, Le pasteur Hippolyte Tayo vient de lancer un séminaire d’hymnologie à Yaoundé. Ce dernier donne aux jeunes gens des valeurs musicales et leur apprend aussi à garder la tête froide. « A la vulgarisation des instruments, s’ajoute également la préparation de l’esprit aux assauts du star system », observe l’hymnologue. A propos de ce risque, il rappelle qu’il ne prend jamais de cachet à la suite d’un concert religieux, alors que la première question des organisateurs de telles festivités tourne sur cette réalité financière, là où on est supposé servir notre Dieu.
Pour finir le Pasteur rappelle que l’Evangile voudrait que les talents et le star system s’effacent devant notre jésus. « Car nous sommes en fait des plaques indicatrices du chemin qui mène vers le bonheur. Si on le comprend, c’est la fin du bling bling, chère à Nicolas Sarkozy.
Ainsi raisonne ce chantre de l’EEC, qui reste très attaché à la culture musicale au point d’en faire une dimension stéréo avec la parole qu’il distille depuis juillet 2020 à la Paroisse dite Rue Manguier. Car prier c’est bien mais prier en chantant c’est encore mieux. Saint Augustin ne dirait pas mieux !
Directrice de la publication Agathe KUISSU
Rédacteur en chef Emmanuel Mayega
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